Les personnes atteintes de cette maladie rare peuvent aider à accélérer la recherche en contribuant à déceler des indicateurs clairs de la progression de la maladie
Sophie Lorenzo
10 août 2023
Imaginez que vous soyez un adolescent et que vous appreniez que vous serez en fauteuil roulant avant 30 ans et que vous dépendrez entièrement de vos proches pour tous les aspects de votre vie quotidienne. C’est un pronostic difficile à affronter. C’est la triste réalité pour de nombreuses personnes qui développent l’ataxie de Friedrich, une maladie neurodégénérative rare qui affecte principalement le système nerveux et le cœur.
« Il s’agit d’une maladie à progression lente qui débute généralement dans l’enfance et l’adolescence. Plus cela commence tôt, plus cela progresse rapidement », explique le Dr Massimo Pandolfo, un neurologue spécialisé dans l’ataxie de Friedreich (AF) qui a dirigé l’équipe qui a découvert le premier gène lié à la maladie. « Éventuellement, les personnes atteintes d’AF ne pourront plus contrôler leurs jambes ni même leurs mains ; ils pourront avoir des déficiences visuelles et auditives considérables, et une minorité importante développera de graves problèmes cardiaques. »
La maladie provoque une dégradation du tissu nerveux dans certaines parties du cerveau et de la moelle épinière, entraînant une perte de contrôle des mouvements du corps (ataxie), qui s’aggrave avec le temps. L’espérance de vie varie entre 40 et 50 ans. Il est estimé que 15 000 personnes dans le monde vivent avec l’ataxie de Friedrich. Un nombre important se trouve au Québec et dans les régions acadiennes des Maritimes, en raison de ce qu’on appelle l’effet fondateur, qui concentre les conditions génétiques dans des régions qui se sont développées avec des populations isolées.
Voir des changements clairs
Il n’existe actuellement aucun traitement permettant d’arrêter ou même de ralentir la progression de la maladie. Le développement de nouvelles thérapies pour l’AF, comme pour de nombreuses maladies neurodégénératives rares, a été limité par le manque d’indicateurs validés et sensibles de la progression de la maladie.
Le Neuro (Institut-Hôpital neurologique de Montréal) s’est associé à l’Alliance internationale de recherche sur l’ataxie de Friedreich (FARA). Leur étude appelée TRACK-FA vise à accélérer la découverte et l’approbation de nouveaux traitements en améliorant notre compréhension des modifications du cerveau et de la moelle épinière et à déceler les indicateurs les plus prometteurs.
« Évaluer l’amélioration clinique d’une maladie à évolution lente comme celle-ci est difficile ; nous pouvons voir les changements plus clairement chez les patients plus jeunes qui peuvent encore marcher. Nous aimerions avoir des indicateurs clairs qui montrent l’effet d’un traitement en quelques mois — plutôt qu’en quelques années. À cet égard, les examens IRM sont très prometteurs », poursuit le Dr Pandolfo, chercheur principal au Neuro pour l’étude.
Partager son portrait unique
Les patients sont des partenaires importants de la recherche. Cette étude leur offre l’occasion de contribuer à l’avancement de la recherche sur l’AF en partageant leur propre parcours de la maladie unique.
Pour cette étude observationnelle, aucun médicament n’est testé. L’étude comprendra trois visites sur cinq ans. Les tests incluront la neuroimagerie (IRM) de la colonne vertébrale et du cerveau, ainsi que des évaluations cognitives, de l’humeur et de la parole, des tests cliniques et le prélèvement d’un échantillon de sang. Les tests de l’étude sont indolores et, à l’exception du test sanguin, non invasifs.
L’ensemble de ces mesures permettra à l’équipe internationale de déterminer quel indicateur (aussi appelé biomarqueur) est le plus sensible pour détecter la progression de la maladie.L’objectif est d’utiliser rapidement les biomarqueurs les plus prometteurs dans des essais cliniques avec des échantillons plus petits de patients et des périodes d’observation plus courtes. L’espoir est que les personnes vivant avec l’AF pourraient accéder plus rapidement à de nouvelles thérapies.
« Il y a vraiment un grand besoin de traitements efficaces. Cette étude est importante car elle nous en apprendra beaucoup plus sur la maladie elle-même et sur la façon dont elle affecte différentes parties du cerveau au fil du temps. Et surtout, cela nous permettra d’avoir un moyen très puissant d’évaluer l’effet des traitements potentiels dans les futurs essais cliniques », conclut le Dr. Pandolfo.
Le Neuro est le seul site au Canada à participer à cette étude et peut accepter des participants de partout en Amérique du Nord (les frais de déplacement seront couverts). Il s’agit également de la première d’une poignée d’études sur l’ataxie de Friedrich qui débuteront au cours des prochains mois au Neuro.
Pour en savoir plus, contactez info-cru.neuro@mcgill.ca ou (514) 398-5500.